Sortir : Pour commencer, vous arrivez en terrain connu à Monségur...
Rhoda Scott :
Effectivement, c'est la troisième fois que je viens et c’est un réel plaisir. Vous savez, à chaque fois que je monte sur scène, c’est comme la première fois, mais certains endroits restent plus en mémoire que d’autres. La plupart du temps, ce qui me touche, c’est l’ambiance... Et à Monségur, c’est convivial, chaleureux, ce lieu m’a vraiment marquée. D’ailleurs je parle tout le temps de ce festival, je lui fais une promotion internationale (rires).

Sortir : Du coup pour l’occasion, vous passez par Bordeaux.
Rhoda Scott :
Oui, c’est une visite rapide mais ça me fait plaisir de voir comme tout a changé ici. Il y a vingt ans, je regardais cette ville sans trop la voir. Je la trouvais conservatrice et très sombre... Et en arrivant hier, je me suis rendue compte que tout avait été rénové, et que Bordeaux savait faire preuve d’une grande modernité finalement !

Sortir : Vous avez eu le temps de faire quelques visites ou de goûter quelques spécialités ?
Rhoda Scott :
Ah oui, j’adore venir dans le coin pour manger quelque chose que je ne trouve nulle part ailleurs : les huîtres accompagnées de saucisses grillées. Et puis, bien que ma visite soit courte, j’ai voulu prendre un peu de temps pour aller au musée d’Aquitaine, voir l’exposition sur la traite négrière. Mon père était d’origine africaine, je ne connais pas vraiment mes racines mais l’esclavage est un sujet qui me passionne et me bouleverse. J’ai fait de nombreux voyages pour le connaître au mieux et l’exposition que vous avez ici à Bordeaux est complète. Honnêtement, dans ce musée, j’ai eu l’impression que toutes mes découvertes passées étaient réunies, c’était très émouvant. 

Sortir : Dans votre vie, on a l’impression que la France compte également beaucoup...
Rhoda Scott :
Je vis en France depuis de nombreuses années maintenant, c’est le pays où mes enfants ont grandi. Ici, les chansons ont souvent de superbes paroles... Sur un des mes albums, j’ai chanté Partir quand même de Françoise Hardy, c’est un morceau qui me parle, La pluie fait des claquettes de Nougaro est magnifique également... Ce sont des chansons que l’on ne peut pas jouer sans connaître les paroles. Et puis, je m’investis beaucoup dans la vie du pays, j’ai obtenu la nationalité française, c’est quelque chose de très important pour moi... Je me suis d’ailleurs beaucoup intéressée aux dernières élections.

Sortir : Et quel rapport entretenez-vous avec votre pays d’origine ?
Rhoda Scott :
Je ne vais aux États-Unis que pour voir ma famille ou faire des concerts. Je n’y vis plus, mais ce n’est pas pour autant que je délaisse mes devoirs de citoyenne américaine. Je vote également là-bas et la symbolique derrière l’élection d’Obama est magnifique. J’ai assisté à son investiture, et je peux vous dire que je n’avais jamais vécu un tel moment aux USA. Blancs et noirs faisaient la fête tous ensemble, dans une ambiance incroyable. Un ami m’a dit "Je suis content d’être vivant pour voir un événement historique comme ça", et je crois qu’en prononçant ces mots, il avait tout dit.

Sortir : Vous semblez vous investir dans de nombreux domaines, mais quelle est votre grande passion ?
Rhoda Scott :
L’orgue bien sûr. Petite, j’en jouais à l’église, pieds nus évidemment... Avec le pédalier de 25 notes, j’ai toujours trouvé ça beaucoup plus logique. Depuis, j’accorde toutes mes musiques à cet instrument, et je lui fais voir du pays... Demain, on répète à Paris et en fin de semaine je joue à Lyon, je vais faire découvrir mes racines aux rhodaniens.